Déclaration de Mme Christine Lagarde à Washington. Par Didier REMER



Voici les extraits de la déclaration de madame le ministre de l'économie, de l'industrie et de l'emploi, madame Christine Lagarde lors du comité monétaire et financier international (CMFI) de Washington. Sont exposés ici les passages relatifs aux objectifs liés aux paradis fiscaux et pratiques financières indexées lors du G20. La ministre fait le point sur la situation actuelle, de la crise insiste sur la coordination souhaitée par la France qui "restera particulièrement attentive pour la suite donnée aux objectifs de lutte contre les états non coopératifs":



Déclaration de Mme Christine Lagarde,


Ministre de l’économie, de l’industrie et de l’emploi. France
Comité monétaire et financier international (CMFI) Washington – 25 avril 2009


L’activité économique a de nouveau reculé fortement au début de l’année 2009 et la situation demeure aujourd’hui très incertaine. Néanmoins, nous commençons depuis quelques semaines à percevoir quelques signes de stabilisation, notamment en ce qui concerne les échanges commerciaux.

Les gouvernements ont pris en coordination des mesures exceptionnelles pour relancer l’activité économique et les banques centrales ont utilisé leurs divers instruments pour rétablir la liquidité sur les marchés de capitaux et dégeler les marchés du crédit. Ces mesures, qui s’ajoutent aux filets de sécurité déjà existants, auront un impact graduel sur l’activité au cours de 2009 et 2010. Nous devons donc d’ores et déjà préparer une stratégie de sortie et nous engager à maintenir une trajectoire soutenable de nos finances publiques.
Sans attendre l’impact de ces mesures, il est urgent que nous mettions en oeuvre les décisions des chefs d’État et de gouvernement du G20 en matière de réforme de la régulation financière. Ce faisant, nous devrons avancer conjointement pour éviter toute forme d’arbitrage réglementaire, conformément aux principes formulés par nos chefs d’État et de gouvernement. La France sera particulièrement attentive à continuer la lutte contre les juridictions non coopératives grâce à l’OCDE, le GAFI et le Conseil de la Stabilité Financière (CSF), à la définition par le CSF du caractère systémique d’une institution, d’un marché ou d’un instrument financiers, à la quantification d’un critère de rétention pour améliorer les incitations à la bonne gestion du risque dans les activités de titrisation, et au bon respect par nos institutions financières des principes en matière de rémunération.


Le FMI aura un rôle de premier plan pour accompagner la communauté internationale dans son programme de réformes et de rétablissement de la stabilité. Il a déjà fait preuve d’une réactivité exemplaire en menant à bien une révision majeure de son cadre de prêt, couronnée par la création de la Ligne de crédit flexible. Ses priorités pour les prochains mois seront de finaliser l’augmentation de ses ressources à destination des pays émergents et à faible revenu, lourdement affectés par la crise.

La réforme de la gouvernance devra être adaptée pour répondre à ces défis, et pour cela elle devra être menée dans sa globalité.

1. L’avenir de l’économie mondiale, sur fond d’inversion de l’effet de levier et de repli du commerce international, est incertain.

L’année 2008 s’est achevée sur des perspectives très sombres et les premiers mois de 2009 n’ont pas apporté la moindre surprise sur le plan de l’activité économique. Le PIB des pays avancés a subi une forte contraction au quatrième trimestre de 2008 et il faut s’attendre à un recul du même ordre au premier trimestre de 2009. La demande intérieure s’est sensiblement repliée dans les pays développés, en particulier ceux où la croissance était très tributaire du crédit. La chute libre de la demande de ces pays a par ricochet eu de graves conséquences


[...]

3. Les mesures sans précédent et concertées que nous avons prises ces derniers mois aideront à faire repartir la croissance.

Il y a quelques lueurs d’espoir. Pour ce qui est de la France, la consommation s’est bien tenue et, après 5 mois de repli sensible, la production industrielle s’est stabilisée en février. Dans certains pays émergents, d’Amérique latine et d’Asie notamment, dont le secteur bancaire est moins exposé à la crise financière, le redressement pourrait s’amorcer plus vite que dans les pays avancés.

Ces lueurs d’espoir sont apparues grâce aux initiatives de grande envergure et coordonnées que nous avons prises collectivement pour soutenir la demande et stabiliser le système financier. Les grandes banques centrales ont pris des mesures pour débloquer les marchés de la monnaie et du crédit et ont employé leurs instruments de politique monétaire pour détendre la situation. Les marges interbancaires sont maintenant revenues à leurs niveaux d’avant la faillite de Lehman Brothers. Les pouvoirs publics ont engagé de par le monde un vaste effort de relance budgétaire et soutiennent le financement des entreprises et l’activité économique, en privilégiant les PME. En outre, les stabilisateurs automatiques jouent un rôle très important dans la stabilisation de l’économie, car ils visent ceux qui sont le plus touchés. C’est particulièrement vrai pour les grands pays européens, où ils sont puissants. Pour ce qui est du secteur financier, chaque pays prend les mesures qui s’imposent en fonction de sa situation. Une forte coordination est cependant nécessaire pour maximiser l’effet positif des mesures nationales et réduire au minimum les distorsions d’un pays à l’autre. Il convient d’agir de manière responsable, au regard des retombées économiques sur les autres pays, et la dévaluation compétitive des monnaies, en particulier, est à proscrire. Ces mesures produiront progressivement leurs effets sur l’activité dans le courant de l’année 2009 et permettront une remontée sensible de la croissance et de l’emploi l’an prochain.

Nous allons assister à un accroissement rapide de la dette publique, surtout dans certains pays développés qui ont apporté un fort soutien au secteur financier; nous devons réaffirmer notre volonté de rééquilibrer les finances publiques une fois que l’économie se sera rétablie et faire bien comprendre que les mesures budgétaires expansionnistes ont un caractère temporaire.


4. La mise en oeuvre de mesures bénéficiant d’un large soutien doit être la priorité des priorités, notamment dans le domaine de la régulation financière.

Les dirigeants du G20 ont pris des décisions très importantes : il est de la responsabilité de chacun d’entre nous d’y donner suite dès que possible. Les bons élèves ne doivent pas être pénalisés parce que d’autres tardent à appliquer les décisions, ce qui créerait une situation inéquitable.

La France a déjà pris certaines mesures, notamment en ce qui concerne les rémunérations dans le secteur financier. Après consultations entre la profession et les instances de régulation et de contrôle, une longue liste de principes est désormais d’application et j’ai demandé à l’autorité des marchés financiers de présenter un rapport d’étape d’ici mai 2009.


La lutte contre les pays non coopératifs est une priorité pour la France. Il en va de la stabilité financière et de la cohérence de la réforme de la régulation : le contrôle macroprudentiel ne peut être efficace que s’il ne comporte pas d’échappatoires. À cet égard, la France se félicite de la publication par l’OCDE de la liste des places financières qui ne se conforment pas de manière tangible aux normes fiscales internationales. La France prêtera une attention particulière à l’évolution et au suivi de cette liste. J’appelle le CSF et le GAFI à publier la liste des pays non coopératifs dans leurs domaines respectifs de la lutte contre le blanchiment de capitaux et le financement du terrorisme. Ils devront s’appuyer sur les PESF existants, qui doivent être renforcés pour tous les pays dont le secteur financier occupe une large place dans l’économie. Il faudrait que les trois institutions établissent sans tarder un arsenal de sanctions qui pourraient aller jusqu’à l’interdiction totale des activités de nos banques dans ces pays. La France a demandé à la profession financière de formuler des propositions de sanctions, en consultation avec ses partenaires. Les dirigeants du G20 ont demandé aux institutions internationales et aux banques régionales de développement de revoir leur politique d’investissement. En tant que représentantes de la communauté internationale, elles se doivent d’avoir un comportement exemplaire. À cette fin, nous devrions les inviter à rendre compte de l’utilisation qu’elles font des places financières non coopératives et de formuler des propositions en vue de la rupture de leurs relations avec ces pays avant l’été.

Pour assurer la stabilité financière mondiale, nous avons besoin de normes internationales très cohérentes et tangibles, notamment pour éviter les arbitrages réglementaires entre les pays. À cet égard, je me félicite grandement de l’établissement du Conseil de stabilité financière qui, en étroite coopération avec le FMI, participera à la mise en oeuvre des grandes décisions. Parmi celles-ci, la France attache une importance particulière à l’élaboration par le CSF et le FMI de principes directeurs à l’usage des autorités nationales pour déterminer si une institution, un marché ou un instrument financier a une importance systémique, auquel cas il fera désormais l’objet de contrôles. Nous saluons à cet égard la décision prise par les États-Unis et l’UE de créer chacun une institution chargée de la supervision des risques macroprudentiels et systémiques. Plus précisément, des normes doivent être établies pour contrôler les fonds spéculatifs en eux-mêmes, ainsi que les effets de levier qu’ils utilisent, et pour mieux organiser les marchés des dérivés. La France militera aussi en faveur de la définition par le Comité de Bâle, d’ici 2010, de ratios de rétention chiffrés et harmonisés afin de promouvoir la gestion des risques selon les normes fixées par l’UE. De meilleurs instruments prudentiels doivent aussi être mis au point pour atténuer la procyclicalité, notamment au moyen de normes de provisionnement tout au long du cycle définies par le Comité de Bâle.

Enfin, il est essentiel de poursuivre la révision des normes comptables et la réforme de la gouvernance de l’IASB (Conseil international de normalisation comptable) pour que les institutions financières évoluent dans un cadre qui s’accorde avec ce que nos sociétés attendent d’elles : qu’elles financent l’économie, tout en préservant la stabilité financière. À cette fin, les instances de régulation et de contrôle doivent être associées à l’IASB dans le cadre d’une véritable réforme de cet organisme et les instances de normalisation comptable doivent améliorer les normes de valorisation des instruments financiers en fonction de leur liquidité et de l’horizon de leur détention par les investisseurs. [...]


Source: Fond Monétaire International. Tous droits réservés






Le +: Vous souhaitez compléter votre information sur la déclaration de la ministre?Ecoutez l'émission "Le Grand Jury RTL LCI.Figaro" Christine Lagarde invitée du 5 Avril diffusée juste après le G20 de Londres:


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Source: RTL Radio Tous droits réservés

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